La chambre du pendu

Plaquée contre la porte que j’avais enfin trouvée, il me prend. Bestial. Toute la tendresse dont il avait su faire preuve s’est envolée. Il paraît persuadé que je voulais qu’il agisse ainsi. Il redevient l’animal qu’il était, peut être est ce plus facile pour lui de se satisfaire ainsi…

La pénétration n’est pas douloureuse, car malgré ses gestes dominateurs, presque violents, je me persuade qu’il s’agit de maladresse. Je passe mon bras resté libre au-dessus de mon épaule, afin d’atteindre sa nuque, espérant que cette caresse fera réapparaître la tendresse qu’il refoule. Puis, jouant de ma souplesse, j’arrive à l’effleurer de mes lèvres.

Peu à peu, il se détend, ralentit ses mouvements. J’attrape sa main qui me serrait le poigné, et l’accompagne sur mon sein, ou elle sera beaucoup plus utile. Les mêmes sensations que dans le «rêve» m’envahissent enfin. Cajoleurs, enlacés, accouplés, nous ne faisons qu’un. Je suis vraiment femme, et lui n’est plus animal.

Une larme, chaude, tombe sur ma nuque. Notre accouplement dépasse la simple bête à deux dos. Nos esprits s’accordent, pour se compléter. Les mots qu’Alakian ne prononce pas, il les exprime par ces gestes, comme un pantomime. Il dévoile ses pensées, son histoire.

Lorsque nous laissons nos corps se séparer de quelques centimètres, nos regards ne dévient pas. Nous sommes inséparables, dorénavant. Je ne serai jamais sa compagne, il a déjà Läylena. Mais j’ai un rôle à jouer à ses côtés. Maintenant, je comprends. Je serai l’expression de son humanité. Je suis son «âme». Il ne l’acceptera peut être pas au début, considérant ceci comme une régression de sa condition, mais il saura vite qu’il retrouvera des sensations à jamais perdues.

Maintenant, je sais qui tu es. Et qui je suis. Mes interrogations ont trouvé leurs réponses. C’est comme si j’étais… en toi. Dans ton cœur, dans ton esprit. Je ressens tes doutes, tes envies. Nous sommes liés, quelqu’un, peut être le Maître, l’a décidé ainsi…

Je lui laisse le temps d’accepter mes paroles en rassemblant mes affaires, me préparant à repartir vers notre destin, de moins en moins flou.

Je prends Shérilane par le bras, l’attire à moi. Contre moi, je sens l’animal fuir, se recroqueviller, elle est une partie de mon âme perdue.

Allons-nous en d’ici, je sens notre ennemi grandir, ses rangs s’agrandissent. Il est temps de retrouver les autres, notre lignée doit perdurer et ce village nous appartiendra.
Tu dois boire le sang d’un humain…

C’est la volonté du maître.

Hrp : suite dans la piece aux grimoire.

La porte s'ouvre sur une pièce poussiéreuse.
De grands vitraux filtrent les pâles rayons de la lune pleine, qui bataillent avec les sombres nuages. Au plafond, un chandelier éclaire la chambre d’une lumière vacillante, dans une étrange danse avec des ombres incertaines.

A notre gauche, une tranche de vie, une table massive sur laquelle repose quelques volumes que le temps semble épargner, une plume et un encrier sec depuis des éons. Une petite bibliothèque au fond de la pièce, un fauteuil tourné vers la fenêtre, vers la tempête, tout ici donne l’impression que l’utilisateur de cette pièce ne l’avait jamais réellement quittée, étrange scène mise sous verre il y a des années de cela.
Tout un cric à brac d’objets étranges jonche le moindre espace en hauteur, improbables bibelots, des fioles de verre contenant des liquides de couleurs diverses, des petits pilons, des plumes de corbeaux probablement, peaux et ossements d’animaux, de rats et des cordages élimés siègent un peu partout.

A l’opposé de la pièce, un lit à baldaquin où pendouillent lamentablement les étoffes qui furent, à leur époque, fastueuses. L’état de la draperie laisse à penser qu’il a servi récemment. Un couteau au éclat argentées et vermillon se trouve à quelques mètres de là, des lambeaux de tissus ça et là. Et des traces des pas frénétiques laissés dans la poussière qui jonche le sol. Et enfin, objet de notre convoitise, une grande armoire contenant peut être les trésors si espérés, des vêtements propres.



Visiblement nous ne sommes pas les premiers à visiter cette pièce…
Je délaisse la main d’Angeline, douce présence, chaleur rassurante, mes doigts orphelins se crispent une dernière fois en proie au désespoir de cette absence.
Je m’introduit dans l’inquiétant décor. J’en explore le moindre mètre carré, lançant des regards nerveux dans les recoins d’obscurité où dansent des ombres improbables. J’évolue dans cette chambre au rythme des battements cœur étonnamment lent, qui résonnent dans mon thorax.
Je pose un pied, me retourne vivement, une pointe d’angoisse me chatouillant l’estomac, j’exécute ce ballet martial, la main posée sur la garde. On n’est jamais trop prudent dans ce lieu, d’autant que je me suis laissé allé à un peu trop d’imprudence ces temps derniers.
Finalement, je reviens sur mes pas.
Personne…

Brrrr... Sinistre. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne suis pas surpris.

Maël revenu de reconnaissance nous a invité à entrer, et nous y voilà... On dirais qu'on a batifolé par ici...

Angeline, elle, prend les choses en main, pfiouuu, sacrée minette, elle a du répondant, et après tout, c'est tout ce qui est à même de nous sauver...
Elle tend des vêtements à ma douce, qui sera certes moins sexy mais parée pour l'aventure, et c'est ce qui prime désormais..
Ma dague est solidement placée à ma ceinture, je ne sais pas pourquoi, mais cela me rassure d'être armé, bien vain car je ne saurai point m'en servir, une force de dissuasion, peut être..

Booon, je dois me montrer serein aux yeux de mes compagnons et surtout à ceux d'Hombeline, Angeline la prend à part et lui parle doucement, je n'interviendrai point, je lui lance un coup d'oeil plein de tendresse et de fantaisie pour lui signaler que je ne l'oublie pas...

Je m'approche de Maël, à l'écart...

êtes vous bretteur Maël ? Vous semblez rude combattant, ou n'est ce que fanfaronnade à ma manière ? Je vous taquine.; Je tenais à m'excuser pour mon comportement hautain de mon arrivée.. Dans le pétrin dans lequel nous sommes, fi de mes suffisances mondaines, je tiens à vous dire que vous pouvez me faire confiance, je suis avec vous, et tâcherai d'être solide..

Mon élan héroïque se précise.. Confiance.. Je n'ai même pas confiance moi même en mes réactions face au danger, c'est un baptème du feu pour moi qui n'ai connu que le confort et l'insouciance...
Peut être cette épreuve fera de moi un homme, sera à même de faire de moi un être entier, plus un spectre, une façade....

Angeline se met à l’ouvrage, chinant dans la grande armoire. Ensuite elle attire Hombeline à elle, haussant les épaules…
Elles ont probablement des trucs de femme à se dire. ( )

Et voilà que le nobliau m’amène à l’écart.
Je te promets que si c’est pour des avances, je te mets une grande claque, juste histoire de remettre les choses au point.

Etrange comportement, il hésite, commence sa tirade par ce qui semblerait être une pique, puis enchaîne par… par des excuses ! Hallucinant, j’ai envie de me frotter les yeux, non, de me pincer, ou plutôt de le pincer lui, c’est lui qui déraisonne finalement (en plus ça fait trop mal).
Ainsi, il est capable de faire fi de son ego. Finalement c’est moi qui l’ai peut être mal jugé. Pour autant que je ne suis pas non plus un enfant de chœur…


Après quelques instant d’hébétude (ça je sais très bien faire aussi !), je cille, comme sorti d’un rêve, trésaille légèrement.

Bretteur ? Je ne suis pas vraiment ce que l’on pourrait appeler une fine lame, mais ce n’est pas très compliqué de ce servir de ce genre d’outil… Peut être un jour, vous conterais-je mon histoire, mais le moment ne s’y prête guère. Pour ce qui est de vos excuses, elles ne sont pas nécessaire, je crois que nous ne sommes pas très différent finalement, à notre éducation et notre rang près. Enfin, ce que je veux vous dire, c’est que je vous en dois tout autant. D’ailleurs, ma confiance vous est acquise depuis longtemps, sinon je ne vous aurais confié mon âme pendant que j’arrosais les sangsues. (cf là )
Pour la peine, à la manière des ‘gueux’, le sachant pertinemment, je mets une bourrade amicale à Amadeus. Je ne peut m’empêcher de sourire amusé, une façon de dire sans rancune…

Cette chambre est sinistre, il y règne une aura malsaine. Même avec mes compagnons d'infortune, je ne m'y sens pas à l'aise. Mon regard scrute la pièce, cherchant un hypothétique agresseur. Un bruit dans le couloir et je me retourne pour voir si la troupe de "Crocs & co" ne nous aurait pas suivis.

Angéline se dirige vers une lourde armoire. Je la regarde choisir des vêtements pour mon compte. C'est fou comme elle a gagné en assurance depuis son arrivée au village. Serait-ce ça la force de l'amour... transcender les gens ? alors pourquoi ça ne marche pas avec moi, pourquoi au contraire, je me sens encore plus misérable qu'à l'entrée du village ?

C'est sa faute à lui... Alakian... Il paiera pour son forfait ! Foi d'Hombeline !

Angéline se rapproche de moi, vêtements sous le bras et m'attire vers le lit sur lequel elle me fait asseoir. Derrière elle, Amadeus me fait un clin d'oeil complice et rassurant. En retour, je lui souris, non pas d'un sourire franc mais d'un sourire hésitant. Ses pas l'amènent vers Maël et entre eux débute une conversation qui semble amicale.

Angéline me parle de sa voix douce, cristalline, m'expliquant qu'il y a peut être un moyen de ne plus tomber sous le charme hypnotique des sangsues. J'ai dû mal à la croire. mais pourquoi pas ! après tout n'a-t-elle pas résisté aux paroles d'Alakian...

Je lui prends les vêtements des mains, la remercie d'un petit sourire tout en admirant la tenue plutôt exotique qu'elle m'a choisie. Une tenue certes peu féminine, mais au moins pratique et qui facilitera mes mouvements en cas de danger.

Faisant fi de ma pudeur, je me lève et tourne le dos à la gente masculine, offrant mon profil à Angéline. Ma robe poisseuse finit rapidement à terre, offrant mon corps dénudé à la vue de tous mais à vrai dire je m'en fiche comme d'une guigne, hantée par les paroles d'Angéline. Tout à ma tâche de me vêtir, je commence à la questionner.

"J'aimerai vous croire Angéline... Mais j'en doute. Je me croyais forte et je me découvre lâche et influençable. Enfin ! Racontez-moi toujours, Sait-on jamais...."

D’humeur joyeuse, je m’assoies à la table et commence à farfouiller tout autour de moi. Quelques livres, rien de bien intéressant.
‘J’apprends la magie noire en dix leçons’, ‘Chronique d’un voyage au centre du Mont Ombilic’, ‘Mon ancêtre Gurdil’, ‘les plus belle balades volume 1’…

Un parchemin attire mon regard…
‘Mon Amour,’
Voilà qui ça commence bien, peut être aurais-je le droit de lire quelques mots sulfureux…
Blablablabla…
Au fur et à mesure que mes yeux parcourent les lignes, mes traits se tendent, ma légèreté se dissipe.

Pris entre l’excitation et l’angoisse de ce que laisse présager cette découverte.
Je crois que j’ai trouvé quelque chose… C’est bien dommage, le parchemin est incomplet.

Machinalement, je soulève les objets sur la table à la recherche du morceau manquant, mais… rien. Douloureuse blague de notre hôte, nous offrir ainsi une lueur d’espoir et l’éteindre aussi rapidement du revers de la main.
Luttant contre cette panique sourde qui tente de s’immiscer en moi, je ferme les yeux et m’applique à respirer calmement, doucement.
Pense positif…
Au moins, maintenant nous savons qu’il existe réellement un moyen de nous en sortir…

Je lis le parchemin à mon tour... Une note d'espoir, certes, mais bon, pourquoi se réjouir de cette découverte ? S'il y a espoir c'est qu'il y a péril, et je ne vois pas ce qu'il y a d'enthousiasmant là dedans..

"mon amour, gné gné gné.." Cela nous révèle qu'une force s'est déjà montée contre notre hôte, en vain apparemment...
Elle.. Mmmmh....

Cette femme, cet espoir, Irène, n'est ce pas ? Mmmmh... Vu ce qui se passe ici, je dirais qu'on de grandes chances de ne jamais la trouver, si elle a échoué, elle doit être six pieds sous terre...
D'ailleurs notre romantique à la plume dégoulinante de mièvreries doit lui aussi avoir passé l'arme à gauche, vu que sa lettre, ben son Ava ne l'a jamais lue.
Cette découverte nous éclaire, certes, mais je n'y vois point de bon présage....

Je me retourne vers Hombeline, et je réalise que mes paroles sont dures, implacables, désenchantées.. Je la vois elle, en mal, bouleversée par les derniers évènements, alors je m'avance vers elle, nippée comme une paysanne...

Quelle allure chérie ! Tu es une sorte de beauté champêtre, toute droit sortie d'une toile... Retourne toi que je reluque à quel point ce pantalon modèle ton postérieur que j'aime tant...
Hem.. Mes très chers amis, je propose qu'on reste groupés, et tâchons de trouver des alliés dans le château, il doit rester des gens censés parmis les invités, non ?
Croyez vous qu'en criant son nom Irène viendra nous trouver, la bouche en coeur ?

Fichtre, remotivons les troupes, on va s'en sortir...
Je me met à mon tour à fouiner dans une commode... je n'y trouve rien.
Alors je fouine dans une des armoires, et je trouve un pardessus, quelque peu rapé, mais de cuir et clouté, on dirait un costume de pirate, celui ci me conférera une protection légère tout en me laissant libre de mes mouvements...
Je l'enfile, tout en m'imaginant de somptueuses batailles et autres abordages dans des mers chaudes....

À L'aboordaaaage !!!!

Hum.. Oups, me suis emballé..

Les mots d’Amadeus trouvent une résonance étrange en moi.
Il a raison... Du moins, il n’a pas tord.
Délaissant mon manteau maculé de sang, puis pour me donner une contenance, je parcours du doigt l’éventail de vieux bouquins poussiéreux sur les étagères.
Rien, rien de rien !
Soudainement rageur, je descends une étagère entière. Les livres s’étalent sur le sol, je les regarde quelques instants, laissant déambuler mes pensées.

Puis comme émergeant d’un songe…
Il n’y a plus rien d’intéressant ici. Nous ne trouverons ni Irène, une solution à nos soucis.
Je parcours du regard la chambre, m’approchant d’Angeline.

Une clameur sourde fait résonner les murs de tout l’édifice, comme… un rire démoniaque, le rire du croquemitaine. Un sentiment d’urgence naît progressivement en moi, et malheureusement les fanfaronnades du libertin de service n’y changeront rien.

Je cherche le regard de mon oie blanche, elle qui me bouleverse. J’y puise la force qui me manque, la tension se relâche lentement.
Rendons nous ailleurs, mettons ce château à sac s’il le faut, mais trouvons…

Je trésaille, surpris, puis fait volte face.
Cette étrange femme qui vient de s’introduire dans la chambre, son visage me dit vaguement quelque chose.

Ce regard franc, sûr de lui, si cruel, lui m’est totalement étranger. Par contre, je m’attarde sur ses traits, détaille le contour de ses lèvres, le galbe de ses formes. Une mutation s’était opérée, étrange chrysalide que voilà, mais il me semble reconnaître… Mes yeux s’étrécissent.

La jeune femme de la taverne, celle qui a pris le verre de vin sur la robe. Mon dieu, mais qu’avez-vous donc fait ? Vous n’avez pas…
Dans ma voix sonnait l’horreur mêlée à la consternation. Elle ne ressemblait plus à la jeune femme pommée qu’elle était en arrivant. Maintenant, quelque chose de dangereux, outre sa dextérité à manier un bout de bois le transformant en arme mortelle, mais quelque chose de maléfique émanait d’elle.

…Prêter vous aussi allégeance au décharné qui hante ces lieux ?
Je termine cette question sur un ton méfiant. Mon cœur s’arrêterais presque de battre à cet instant.

Son sourire et son attitude ne semblent aucunement agressifs à notre égard, surtout depuis qu’elle a cessé de gigoter cette canne.
Pardon, mais peut-être auriez-vous besoin de vous regarder dans un miroir. Vous êtes... Comment dire sans vous blesser... bien loin du typique humain. Nous avons tous changés ici, mais votre… métamorphose est pour le moins surprenante, voir même inquiétante, elle n’est pas sans rappeler celle d’Aislin.

Je relâche finalement la tension dans mes muscles, dans un soupir silencieux. Je la fixe, tente de capter son regard, légèrement et inexplicablement ‘à côté’. Pris d’un élan de compassion, de sollicitude…
Que vous est il donc arrivé ?
Vous a t’on lancé un mauvais sort ?
Y a-t-il un moyen d’y remédier ?

Je m’arrête soudain, réalisant que je martèle de question la jeune femme. Dans un souffle, je termine par un…
Racontez-nous…

Troublé, je la vois s’avancer, libérer la porte, le regard soudain dans le vide. Elle ne sourit plus, et moi je ne comprends plus grand-chose. Je cherche une réponse dans les yeux de mes compagnons, mais ils semblent sujets au même trouble.
Est-elle amie ou ennemie ? Je ne peux y répondre…
A la voir manipuler sa canne au sol, je comprends, elle est aveugle ! Mais ce regard tourné vers le néant, n’est pas seulement celui de la cécité.

Là où je lisais de l’inquiétude, de l’agitation, il ne reste plus qu’une pale souffrance, de l’amertume.
Cette femme traîne un lourd fardeau, celui de ses choix, sait-elle seulement qu’il est possible de changer ?

Lentement et avec la légèreté d’un rôdeur, je me déplace dans la salle. Attrape le fauteuil que j’amène à la jeune femme. Doucement, très lentement, je me place derrière elle. Me sachant en danger, je joins la parole au geste. D’une voix calme, presque caressante, comme on dompte un fauve…

Je suis derrière vous, avec un fauteuil. Vous avez l’air, tout comme nous tous, fourbue.
Je déglutis avec peine. ‘Pure folie !’, me hurle une voix dans la tête. Qu’importe ce ne sera pas la première fois ce soir. J’avance le siège et le présente à la jeune femme. Posant une main amicale sur son bras.
Tenez asseyez-vous.

Beuh...
Qu'est ce qu'elle nous veut la jeune fermière ? Elle mesemblait humer le terroir à la maison du maire, elle m'a semblé bien affriolante dans les thermes, voilà que désormais j'ai affaire à une créature tout aussi effrayante que les autres représentants du bestiaire des horreurs qu'on croise de plus en plus souvent dans les couloirs...

Maël se montre doux avec elle... Pfff... Moi elle me regardait de travers à mon arivée, complexée par sa caste inférieure, sans aucun doute, puis elle a refusé mes avances dans les thermes, non sans prendre soin d'affoler mes sens au préalable..
Allumeuse va !

je l'aime pas je l'aime pas je l'aime pas...

Mais bon, plus on sera d'alliés, plus on a de chances de s'en sortir... Alors, c'est du lard ou du cochon.. Ellen'a pas l'air d'y voir plus clair que dans le derrière d'une orque.. Oui, expression de braillard de boulevard, mais avec un cachet exotique qui me plait.

Je me place face à elle, et me met à lui aire des grimaces et autres simagrées pour vérifier qu'elle ne voit rien, sous le regard ahuri de mes compagnons...

Elle ne voit rien.

Angeline a l'air terrorisée de voirson galant si près de cette femme aux intentions obscures...
MMmmh... Peut être sait elle des choses....

Dites très chère.. Vous voir ici me ravit, votre nouvelle apparence déconcerte au prime abord, mais je dirais à la reflexion que cela vous sied à merveille...

Làààà, petite latterie pour la mettre en confiance, ça marche dans les receptions avec les courtisanes, pourquoi pas dans une chambre lugubre avec une créature aveugle ?

.. Nous devons nous serrer les coudes pour sortir d'ici, une piste nous réunit.. Une femme, nommée Irène pourrait nous aider.. Vous ne la connaissez dites vous, mais viendrez vous nous aider à la retrouver ? Quelles pièces avez vous déjà exploré ? Par élimination en faisant le compte d'où chacun est passé, nous verrons bien que certaines pièces inexplorées n'attendent que nos investigations, n'est ce pas ?

tssss, elle m'agace avec sa canne, là, elle la manipule comme un jouet chéri..

... Alors, je sais pour ma part que cette Irène ne se trouve ni dans la pièce aux grimoires, ni dans la salle commune, ni dans la chambre rouge..Mes amis ?

Alors je me rapproche d'Hombeline, je la trouve étrangement distante depuis notre arrivée dans cette chambre...
J'ai besoin de sentir son odeur, de passer ma main dans ses cheveux.. J'ai besoin d'une attention de sa part...

Le regard bas, je n’ose fixer les prunelles d’Angeline. Je me concentre sur ma respiration, je mets à bas les murs de l’inquiétude, de la peur. Je fixe un point, un seul, la base de la nuque de Dragonnia, mon corps entier est détendu. J’inspire une nouvelle fois, je fais abstraction d’Amadeus, d’Hombeline… Je vais tenter mon va-tout sur un coup, un seul. Amadeus semble faire une belle diversion.

Une expression peinée se dépeint sur mes traits. Mon bras se lève bien haut, puis dans l’expiration, brusque. Mon poing s’abat sur la frêle jeune femme.
Ce geste presque alimentaire, je ne l’ai que trop exécuté, sur des gens de la caste d’Amadeus et de toi aussi Angeline, une époque bien lointaine que celle-ci, où mon repas dépendait de ces bourses là.
Un goût amer, celui de la culpabilité au fond de la bouche, j’observe le corps de l’égérie de l’Ombre glisser inanimé le long du fauteuil.

Pourquoi… Pourquoi a-t-elle donc fait ce choix là ? Je n’ai malheureusement pas le temps de la convaincre, et ne pouvais laisser s’en aller cette opportunité. Pour mes amis, je me devais de reprendre mes anciennes et viles manières, question de survie…

Presque avec douceur, je replace la femme à la peau de cuir sur le fauteuil. En murmurant quelques mots d’excuses. Je me mets rapidement à l’œuvre arrachant des cordes, puis en ligotant Dragonnia, presque à regret. Le chanvre glisse bruyamment, les nœuds se ferment, se serrent sur les délicats poignets de ma victime.

Je relève la tête, échange un regard sans joie à Angeline, je lui tends la main.
J’ai besoin de ce coin de réconfort, de chaleur, que seul toi tu peux m’offrir. Cette main qui vient de commettre son vil office, devant tes yeux innocents, je t’ai dévoilé la plus terrible part de mon passé. Voudras-tu seulement encore de moi, après avoir vu cela ?

J’ouvre la bouche, ma gorge est nouée.
Filons, ces liens ne tiendront pas longtemps…